Présentée comme une prouesse technologique au service des populations et de l’environnement, le modèle smart city fait émerger de nouvelles problématiques à Singapour.
Une ville dans un jardin, voilà comment Singapour est présentée dans le programme de développement de la ville. Avec ses 5,4 millions d’habitants la ville est au cœur d’un projet de « smart city ». Ce concept d’urbanisme correspond à l’évolution croissante de la démographie urbaine depuis le XXème siècle et le développement massif des technologies à travers le monde. Le colloque “Smart and sustainable cities” qui prend place dans la Biennale ECOPOSS a permis de mettre en avant le développement de la smart city, un concept qui allie urbanisme et usage des technologies au quotidien dans la ville. Le chercheur Raphaël Languillon-Aussel y a présenté le cas des smarts cities en Asie en utilisant l’exemple de Singapour.
Une ville gouvernée à plusieurs
La smart city complexifie considérablement le rapport de la politique à l’urbanisme. L’image d’un maire qui dirige seul la ville serait une idée désuète puisque la smart city englobe un nombre d’acteurs qui dépasse le cadre d’un conseil municipal. Des acteurs privés, des industriels du numérique, les GAFAM et autres plateformes digitales telles que Uber ou Airbnb ont un rôle à jouer pour développer les smarts cities.
Incorporer la nature et la technologie
Devenir verte et connectée voilà comment la Cité-Etat asiatique souhaite évoluer. Face à un foncier limité, la verticalité est de mise. Jardins suspendus, bâtiments végétalisés s’associent au développement de capteurs ou objets connectés qui se développent dans l’espace public. Pour répondre aux enjeux environnementaux, la smart city a pu être présentée comme un remède contre le réchauffement climatique. Selon Raphaël Languillon-Aussel « le numérique dans la ville permet d’apporter la centralisation de l’information ». Elle peut alors collecter, rationaliser l’usage des ressources et maitriser la consommation énergétique en fonction de l’affluence ou de l’ensoleillement par exemple.
Un modèle contesté
La smart city reste un produit faillible et politisé. La fuite de milliers de dossiers numériques sanitaires en 2018 à Singapour ont contribué à accroitre la méfiance des habitants à l’égard de la collecte de données. La smart city ne ferait pas consensus auprès des Singapouriens selon le chercheur, la technologie a toujours ce potentiel polémique même dans les territoires fortement développés. Elle reste aussi liée à l’usage que les politiques en font. Une bifurcation autoritaire reste possible en particulier dans les territoires adeptes du contrôle des populations. Les dépenses énergétiques liées au déploiement des outils, rendant la ville intelligente, renforcent le caractère non-écologique de ce produit parfois assimilé à un produit de marketing territorial.
Denzel BENAC