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Les défis de la contraception masculine

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14 juin 2024
La contraception masculine demeure méconnue dans le domaine de la santé reproductive. Alors que les femmes disposent d'une dizaine de méthodes contraceptives, les options pour les hommes sont limitées. Quelles perspectives pour la contraception masculine ?
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Une pilule dans une pain
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De quoi s’agit-il aujourd’hui ? 

Lorsque l’on parle de contraception dite masculine, la plus connue et plus utilisée est le préservatif. Il s'agit du seul contraceptif à protéger des infections sexuellement transmissibles (IST). Il existe également la stérilisation masculine grâce à la vasectomie. Cette intervention chirurgicale consiste à bloquer les canaux déférents, empêchant ainsi le déplacement des spermatozoïdes. Elle offre une solution permanente pour ceux qui ont pris la décision de ne pas avoir d'enfants ou qui n’en veulent plus. Peut-on pour autant qualifier la vasectomie de contraception, dès lors qu’elle est quasi-définitive ? Cette opération peut en effet être réversible, mais le résultat n’est pas garanti.  

Les avancées technologiques et médicales ouvrent de nouvelles perspectives dans ce domaine. Les contraceptifs hormonaux masculins sont en développement, offrant une approche non chirurgicale pour de la contraception masculine. Ces méthodes impliquent la modification des niveaux hormonaux pour inhiber la production de spermatozoïdes. Plusieurs options sont actuellement explorées, mais présentes des limites. La contraception hormonale par injection, est la seule approuvée par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Celle-ci, a réalisé une étude qui a confirmé son efficacité chez 96% des utilisateurs. Il s'agit d’injections hebdomadaires de testostérone permettant l’arrêt de la production de spermatozoïdes après trois mois. Cependant, l’OMS recommande une utilisation de dix-huit mois maximum. Certains hommes peuvent être réticents en raison des effets secondaires associés à la modification hormonale. Comme la pilule féminine, ces effets incluent parfois des changements d'humeur, de l’acné ou d'autres réactions indésirables. L'injection périodique peut aussi être contraignante pour certains utilisateurs.  

Finalement, pourquoi ça ne marche pas ? 

En 1972, l'OMS entreprenait un programme sur la régulation de la fécondité masculine, qui fut suspendu sept ans plus tard en raison de divers obstacles. Parmi eux, le manque d'intérêt de l'industrie pharmaceutique et de la communauté médicale a constitué des freins majeurs. En France, les praticiens sont généralement rémunérés à l'acte, cela peut inciter à privilégier des méthodes contraceptives nécessitant un renouvellement régulier d'ordonnance. Ce qui n’est pas le cas du préservatif et de la vasectomie. En revanche, au Royaume-Uni, où les praticiens sont payés de manière forfaitaire selon le nombre de patients, l'approche pourrait être différente. Avant prescription, l’information sur l'ensemble des méthodes existantes est obligatoire pour les médecins généralistes. Les femmes entre 15 et 49 ans qui ont recours à des méthodes contraceptives dites masculine (préservatif, vasectomie) est de 54% en Angleterre contre 15% en France.  

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Vers une responsabilité de la contraception partagée ? 

Depuis la législation de la pilule féminine, la contraception est devenue essentiellement une question pour les femmes. Aujourd’hui, est-ce plus compliqué pour les hommes de prendre en charge cette responsabilité pour laquelle les femmes se sont battues ? En 2017 d’après une enquête de SOLIDARIS, 51% des femmes souhaitaient que leur partenaire utilise des méthodes contraceptives masculines si elles étaient commercialisées. Dans cette optique, Dr Alma Depreux, médecin généraliste à Tourcoing, souligne l’importance du partage de la contraception dans le couple et propose d’alterner les méthodes de contraception au cours de la vie. Comme la contraception masculine est un protocole à durée limitée, pourquoi ne pas alterner la responsabilité afin qu’elle ne repose pas uniquement sur la femme ?  

 

La méthode thermique : disponible mais non-validée 

Une méthode basée sur la contraception thermique, impliquant l'utilisation d'un anneau ou d’un sous-vêtement chauffant, est également en cours d'exploration. L’efficacité de la contraception apparaît trois mois après le début du port quotidien du sous-vêtement. Bien que cette technique offre une approche non hormonale, elle est confrontée à des limitations pratiques. Le besoin de porter un vêtement spécifique quotidiennement pendant 15h et de maintenir une température précise peut être inconfortable pour certains. De plus, la faisabilité de la méthode dépend en partie du niveau d'implication et de suivi de l'utilisateur. Sur 51 couples qui ont testé la méthode thermique, une grossesse a été observé. En France, seul le CHU de Toulouse fourni ce sous-vêtement, ce qui a conduit plusieurs femmes et hommes à le confectionner eux-mêmes. Cela peut notamment poser un problème quant à l’effet inhibiteur. Si Maxime Labrit a pu labelisé son andro-switch, L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a interdit  sa vente en décembre 2021. L’agence déplorait un dispositif médical sans marquage européen «CE» garantissant son efficacité et sa sécurité d’utilisation.   

 

Les pistes de recherches en cours 

Il existe plusieurs options en cours d’études dans différents pays.  

  • Risug et Vasalgel : il s’agit d’injections locale, par un médecin, de gel non hormonal qui comme la vasectomie, vont agir sur les canaux déférents. Actuellement testé en Inde, Risug est à l’étape 3 des essais cliniques de phase, c’est-à-dire, tester son efficacité et sa sureté. Aux Etats-Unis, Vasagel n’a été testé que sur des animaux pour le moment 

  • Pilule contraceptive masculine : Depuis les années 1970, plusieurs chercheurs travaillent dessus. Il s’agirait d’un moyen contraceptif temporaire, qui permettrait de diminuer voire bloquer la production quotidienne de milliers de spermatozoïdes. Un projet laborieux qui pour l’instant, ne fonctionne que sur les souris. 

 

 

Rokhaya CORREA

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